galaté Posteur Ethiopien
Nombre de messages : 3001 Age : 61 Localisation : MONTIGNY Emploi/Loisir : fonction publique Date d'inscription : 15/11/2008
| Sujet: C'est beau Jeu 16 Avr - 9:15 | |
| HARUKI MURAKAMI « …. Non, ne pense pas à de la bière. Et ne pense pas non plus au soleil. Oublie le vent. Oublie l’article à rédiger. Concentre-toi simplement sur tes pieds. Fais-les avancer, l’un après l’autre. Là, maintenant, rien d’autre n’a d’importance.[/size] J’ai dépassé les trente-cinq kilomètres. A partir de là, c’est pour moi la terra incognita. Jusqu’à présent, jamais encore je n’ai couru au-delà des trente-cinq kilomètres. A ma gauche, une ligne de montagnes dénudées, pierreuses. Elles semblent tout à fait stériles, dépourvues du moindre chemin. Qui donc, quelle sorte de dieu a bien pu créer ce genre de chose ? A ma droite, des champs d’oliviers à perte de vue. Tout semble recouvert d’une fine poussière blanche. Et ce vent âpre venant de la mer qui m’attaque la peau sans cesse. Mais c’est quoi, à la fin, un vent pareil ? Pourquoi faut-il qu’il soit si violent ?Aux environs des trente-sept kilomètres, je me mets à tout haïr. Ça suffit, j’en ai assez. Je ne veux plus courir davantage. Mon énergie est au plus bas. C’est comme si je conduisais une voiture à sec. J’ai envie de boire, mais si je m’arrête maintenant, je crois que je ne pourrai plus repartir. J’ai soif. Soif….… J’ai dépassé les quarante kilomètres.« Plus que deux kilomètres ! Allez, tenez bon ! » me crie le rédacteur, d’une voix encourageante, de la voiture. « Facile à dire ! » ai-je envie de lui retourner. Mais je ne le fais pas, je me contente de le penser. Ce soleil dénudé est atrocement chaud. Il n’est que neuf heures du matin, et la chaleur est abominable. La sueur me coule dans les yeux. Le sel me brûle les yeux, et durant quelques instants, je ne vois plus rien….… Au-delà des hautes herbes d’été, j’aperçois l’arrivée, le monument dédié au marathon historique, à l’entrée de la petite ville de Marathon….… Ce sont maintenant les derniers mètres de la course et je veux absolument courir le plus vite possible, en donnant mes dernières forces. Hélas ! Mes jambes sont autonomes et ne m’obéissent pas. J’ai complètement oublié comment mettre mon corps en mouvement. Tous mes muscles me font l’impression d’avoir été rasés par un rabot rouillé.Ça y est.Ça y est, j’ai atteint le but. Je n’ai curieusement pas le sentiment d’avoir accompli ce que je voulais. La seule chose que je ressens est le soulagement intense de ne plus avoir à courir»Voici Haruki Murakami, journaliste japonais. Il vient d'écrire un livre formidable sur son expérience de coureur à pied: Autoportait de l'auteur en coureur de fond édition Belfonds | |
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